publié dans La Galerie du Spectacle
À la fin de la pièce, quand les comédiens Yordan Goldwaser et Anthony Boullonnois tireront la révérence, vous n’aurez toujours pas compris. Et pourtant on vous aura prévenu. Même si on est habitué aux spectacles imprévisibles et souvent dérangeants présentés aux espaces la Loge, il y a quelque chose de plus avec Ruines. Un défi encore plus net, duquel les spectateurs ne peuvent pas sortir indemnes.
Arrivez donc à l’heure. Le prologue commencera avec cinq minutes de retard, mais arrivez à l’heure car ces cinq minutes, et ce que vous avez fait pendant ces cinq minutes sont l’accroche dont vous aurez besoin pour saisir les premières questions de Goldwaser. Vous ne le savez pas, mais vous êtes déjà dans le jeu, et vous allez comprendre pourquoi il fallait rire des premières blagues et du ton faussement didactique du professeur qui s’enfonce sur la question de la définition du temps avant de vous plonger dans un état d’esprit qui semble essentiel
pour tenir tout au long de la partie centrale de la création : Ruines est une pièce lourde de sens et demande un effort aux spectateurs, mais Goldwaser et Boullonnois arrivent à faire entrer le public dans la peau d’Antonin, et surtout dans son espace mental, circonscrit par une scène habitée d’un écran télé et d’un poisson rouge. On sait qu’on ne pourra pas le comprendre, (Antonin, pas le poisson) mais on se laisse entraîner dans ce jeu dérangeant parce qu’on sait qu’il utilise le monologue pour nous faire partir dans nos monologues.